LE MARKETING TERRITORIAL À L’ÉPREUVE D’INJONCTIONS CONTRADICTOIRES

Une tribune d’Anaïs qui contribue au magazine Brief – le mensuel de la communication publique et territoriale – du mois d’avril 2022, à retrouver ici

Un sujet qui nous a été inspiré et remonté par les projets menés sur les territoires auprès des collectivités que nous accompagnons.


 

Les injonctions contradictoires sont quotidiennes dans un monde qui bouge, et qui bouge vite, rendant plus complexe encore ce qui l’est déjà bien assez ! Les décideurs, marketeurs territoriaux, développeurs économiques, … font face à leur lot de paradoxes sur l’attractivité et l’hospitalité des territoires.

Il en va des projets déployés à différentes échelles : ville, intercommunalité, pays…à l’appui de visions politiques et stratégiques parfois divergentes. Comment dans ce cas garantir complémentarité et convergence dans le déploiement de l’offre de services ?

Il en va également du phénomène de sur-attractivité qui provoquent des « effets rejets » quand, dans le même temps, beaucoup de territoires ont encore à attirer des actifs, des entreprises pour créer de l’emploi, pour proposer les services utiles aux résidents ; encourager l’installation des jeunes et des ménages avec enfants pour veiller au renouvellement de la population et faire face aux enjeux démographiques.

Il en va aussi de l’impératif d’un développement durable des territoires, où l’attractivité se pense aussi à l’aune des réponses à apporter à l’urgence climatique et, plus globalement, aux enjeux environnementaux, sanitaires et sociaux auxquels nous devons faire face. Là encore, comment concilier par exemple, attraction de projets économiques pourvoyeurs d’emplois et pression foncière pour limiter l’artificialisation des sols ; ou face aux difficultés de recrutement des entreprises, justifier l’attraction d’actifs extérieurs au regard de la part d’actifs sans emploi sur le territoire, …  Comment tenir un discours de promotion externe sans être en décalage avec les préoccupations et les attentes des populations locales ?

Ces injonctions appellent à trouver des solutions nouvelles et des réponses multiples adaptées à la situation de chaque territoire. Elles ramènent donc inéluctablement au projet et à la stratégie, rendent incontournable le travail en transversalité (quitte à bouleverser parfois les équilibres des organisations…), la mobilisation et l’animation des parties prenantes qui participent à la mise en œuvre. Elles remettent la question de la gouvernance au cœur des réflexions.

Pour apporter les bonnes réponses en pensant dans le même temps attractivité et hospitalité du territoire ce sont aussi bien des compétences de la ville que celles de l’agglomération qui sont mobilisées (services et aménités du quotidien, accueil des nouveaux habitants, aménagement des places publiques, services de mobilités, développement économique, grands projets urbains, …). Il faut mettre tout le monde autour de la table. Et les programmes de marketing territorial aident à structurer des gouvernances ouvertes, agiles, pour bâtir des stratégies concertées, complémentaires.

Sur les externalités négatives de l’attractivité et pour assurer un développement durable et respectueux des ressources locales (naturelles, humaines, …), là encore le marketing – ou dans certaines situations le « démarketing », qui reste du marketing mais poursuivant des objectifs différents : dissuader ou modifier les comportements –  met à disposition des outils intéressants. Parce qu’il aide à analyser les problématiques à partir des données : quels types d’emplois ? quels profils d’actifs ? … pour pouvoir mieux cibler son action. Les territoires et collectivités les plus matures travaillent aujourd’hui des stratégies de marketing territorial segmentées (actifs, étudiants, touristes d’affaire…) et s’intéressent de plus près à l’observation de leurs marchés (à l’appui d’études et analyse de données) et à mieux écouter et comprendre les attentes des publics visés.

La boîte à outils du marketing territorial s’avère donc être une ressource précieuse. L’approche marketing invite à regarder ailleurs, à s’inspirer, à capitaliser sur les retours d’expériences, à être agile et s’adapter (l’observation, l’analyse de la demande, l’évaluation, …) et surtout à se placer du point de vue des publics que l’on vise, en les mobilisant pour contribuer à la réflexion aux côtés de celles et ceux qui construisent l’offre, les services, les dispositifs ou les outils de leur promotion.

Elle contraint aux réflexions en profondeur, au travail en mode projet, au partage d’expertises (maîtrise d’ouvrage, maîtrise d’œuvre, maîtrise d’usage). Ainsi, la place et le rôle des Missions marketing (territorial/public) dans les organisations deviennent un enjeu central ; positionnées comme une fonction ressource transversale, à l’interface de l’offre, de la promotion et de la communication elles apportent aux services, par leur approche marketing, une façon différente de penser les politiques publiques.